Procès Mediator : l'étude d'un chercheur de l'Université constitue une preuve clé dans cette affaire criminelle

Gazette
Grégoire Le Gal
Le rôle qu’a joué le Dr Grégoire Le Gal dans l’éclatement d’un des plus gros scandales pharmaceutiques de France a changé la perspective de ce professeur de la Faculté de médecine.


Le 23 septembre s’est ouvert à Paris le procès du Médiator, un antidiabétique qui était également vendu comme coupe-faim en France dès la fin des années 1970. Dr Grégoire Le Gal, professeur à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa, a réalisé une étude qui prouvait que ce médicament était responsable de graves complications cardiaques, causant des milliers d’hospitalisations et des centaines de décès.

La Gazette l'a rencontré.

 


Par Linda Scales

Grégoire Le Gal n’a pas cherché à jouer un rôle dans le plus gros scandale pharmaceutique de la France. Toutefois, quand la Dre Irène Frachon, une pneumologue de Brest (France) comme lui, l’a appelé en 2009 pour lui demander son aide, ce professeur de la Faculté de médecine savait qu’il devait accepter.

« Elle était déjà convaincue qu’il y avait un problème », dit le Dr Le Gal. La Dre Frachon soupçonnait que le Mediator – un médicament antidiabétique vendu comme coupe-faim en France – causait de graves valvulopathies nécessitant souvent des opérations à cœur ouvert.

Tant Servier – fabricant du médicament et employeur de milliers de personnes – que les responsables de la santé publique en France affirmaient qu’il n’y avait rien à craindre, poursuit le Dr Le Gal. La Dre Frachon avait besoin d’aide, car il ne serait pas facile de prouver qu’un médicament en vente depuis 33 ans puisse avoir un effet secondaire d’une telle gravité sans qu’on l’ait su.

« Mon rôle consistait surtout à concevoir et à réaliser l’étude qui a prouvé l’association entre le médicament et la maladie, dit le Dr Le Gal. C’est un défi que j’avais envie de relever. »

Les statistiques aident à comprendre la gravité des problèmes causés par le Mediator : environ 500 personnes sont décédées, et quelque 3500 autres ont dû être hospitalisées.

Un procès criminel s'est ouvert le 23 septembre 2019, dix ans après que le médicament a été retiré des tablettes.
 

 

Un film acclamé par la critique

Cette histoire de David contre Goliath a été racontée dans La fille de Brest. Ce film acclamé par la critique est basé sur le livre Mediator 150 mg : Combien de morts? (2010), dans lequel la Dre Frachon raconte son combat pour faire retirer le Mediator (ou Benfluorex) du marché.

Le film a été présenté pour la première fois au Festival international du film de Toronto en 2016. Depuis, il a été mis en nomination pour plusieurs prix, dont les Césars en France (équivalents des Oscars).

Dans le film, le Dr Le Gal est personnifié librement par le personnage d’Antoine Le Bihan, qui fusionne, selon le médecin, « le rôle que j’ai joué et celui de nombreuses autres personnes qui n’étaient pas aussi coopératives », dit-il.

Le Dr Le Gal est né en France, où il a fait ses études. Il est arrivé à l’Université d’Ottawa en 2012 en tant que professeur et chercheur clinicien à la Divisiond’hématologie, où il a fait des recherches sur la thrombose veineuse. Il travaille aussi à l’Hôpital Montfort.

En tant que médecin, il dit avoir été influencé par le scandale. « Il est important de rester à l’affût des symptômes inhabituels chez les patients qui prennent des médicaments, et de se demander s’il pourrait s’agir d’effets secondaires, même quand le lien n’est pas évident », dit-il. Il croit aussi que le public doit faire preuve de vigilance : « Ce genre de choses ne se produit pas qu’au cinéma! »