L’été au Canada: soleil, smog et neige, l'impact du réchauffement climatique El Niño

Par Isabelle Mailloux Pulkinghorn

Salle de presse/ Newsroom, uOttawa

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L’été au Canada : soleil, smog et neige

Explicatif - L'impact du réchauffement climatique El Niño au Canada

De 30 degrés Celsius à 30 cm de neige. Au Canada cet été, les prévisions météorologiques font état d'un dôme de chaleur, de veilles de tornades, de smog, d’orages violents et... de neige ! Outre les effets des changements climatiques, ces phénomènes météorologiques extrêmes peuvent s'expliquer par « l’effet El Niño ».

Nous nous sommes donc entretenus avec Hossein Bonakdari, professeur agrégé de génie civil (changement climatique, modélisation par l'intelligence artificielle, conception d'infrastructures hydrauliques résistantes aux changements climatiques) à la faculté d'ingénierie de l'Université d'Ottawa, pour en savoir plus.

Q. Professeur Bonakdari, pouvez-vous nous expliquer ce qu'est El Niño ?
Hossein Bonakdari - El Niño est un phénomène naturel caractérisé par le réchauffement de l'océan Pacifique. Il a des conséquences considérables sur les conditions météorologiques dans le monde entier et devrait persister pendant plusieurs années. En utilisant des modèles de prévision climatique, alimentés par l'intelligence artificielle, nous avons été en mesure d'étudier son impact au Canada, lorsqu'il est associé au changement climatique.

La température moyenne annuelle à la surface du globe pour chaque année entre 2023 et 2027 devrait être supérieure de 1,1°C à 1,8°C à la moyenne de 1850-1900.

L'Amérique du Nord connaîtra des conditions météorologiques diverses (fluctuations de température, anomalies de précipitations, incendies de forêt, phénomènes météorologiques violents et écosystèmes perturbés) en raison de l'arrivée en force d'un phénomène El Niño, tandis que l'Europe s'oriente vers un blocage atmosphérique de haute pression (températures élevées ou conditions de sécheresse, vagues de chaleur et précipitations réduites).

Q. Quel sera l'impact spécifique sur le Canada ?
H.B. - Les répercussions du phénomène El Niño sur le Canada se feront sentir à plusieurs niveaux:

1.         Température : El Niño a été associé à des températures hivernales à la fois plus douces et plus froides au Canada. Les régions côtières comme la Colombie-Britannique et les provinces de l'Atlantique connaissent souvent des hivers plus doux pendant les épisodes El Niño. À l'inverse, les provinces des Prairies et les régions septentrionales peuvent connaître des conditions plus froides en raison de la modification des schémas de circulation atmosphérique.

2.         Précipitations : El Niño exerce une influence considérable sur la répartition des précipitations dans l'ensemble du Canada. Alors qu'il tend à augmenter les précipitations dans les régions méridionales de la Colombie-Britannique, de l'Alberta et dans certaines parties des provinces atlantiques, d'autres régions comme le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le nord du Québec connaissent souvent des conditions plus sèches pendant les événements El Niño. Ces changements dans les régimes de précipitations peuvent avoir un impact sur la disponibilité de l'eau, l'agriculture et augmenter les risques d'incendie de forêt, comme nous l'avons observé.

3.         Tempêtes hivernales : El Niño peut également avoir un impact sur l'intensité des tempêtes hivernales au Canada. Les régions côtières, en particulier la côte pacifique, peuvent connaître des tempêtes plus fréquentes et plus intenses pendant les périodes El Niño. Cela peut entraîner des risques accrus d'érosion côtière, d'inondation et de phénomènes météorologiques violents, ce qui souligne l'importance de la préparation et de la résilience des infrastructures. C'est ce qui explique la neige qui a attendu l'Alberta le mois dernier.

4.         Écosystèmes : Les conséquences écologiques d'El Niño vont au-delà des phénomènes météorologiques. Les écosystèmes marins au large de la côte de la Colombie-Britannique, par exemple, peuvent connaître des changements dans la disponibilité des nutriments, ce qui affecte les populations de poissons et les réseaux alimentaires marins. Les régions intérieures peuvent connaître des perturbations dans les schémas migratoires et les cycles de reproduction de la faune et de la flore en raison des changements de température et de disponibilité de la nourriture.

5.         Feux de forêt : El Niño peut également avoir un impact significatif sur l'activité des feux de forêt dans diverses régions du pays. Les températures plus chaudes associées à El Niño peuvent créer des conditions qui renforcent l'instabilité atmosphérique, entraînant un mouvement ascendant accru des masses d'air. Ce mouvement vertical accru favorise la formation d'orages, qui sont connus pour être les principaux générateurs d'éclairs. Pendant les épisodes El Niño, les régions déjà sujettes aux incendies de forêt, comme la Colombie-Britannique et certaines parties des provinces des Prairies, peuvent connaître une fréquence et une gravité accrues des incendies de forêt. La combinaison d'une végétation sèche, de vents forts et de la source d'inflammation que constitue la foudre peut contribuer à la propagation rapide des incendies de forêt dans ces régions.


Q. Quelle est la durée de ces phénomènes El Niño ?
H.B. - On estime qu'il y a eu au moins 30 épisodes El Niño depuis 1900. La durée des événements El Niño peut varier, et il n'y a pas de période fixe pour déterminer la durée habituelle de ces événements au Canada. L'épisode El Niño le plus récent et le plus important au Canada s'est produit entre la fin de 2015 et le début de 2016. Il a duré environ 12 mois et son intensité maximale a été observée au cours de l'hiver 2015-2016. L'hiver 2015-2016 (décembre-janvier-février) a été d’un à cinq degrés Celsius plus chaud que la normale dans toutes les provinces, avec une chaleur particulièrement inhabituelle pour la saison au Québec, dans le centre des Prairies et au Yukon. Par la suite, le printemps 2016 est resté plus chaud que la normale dans l'ouest du Canada et dans les Prairies. Mais le dernier épisode El Niño a eu lieu entre février et août 2019 et son impact a été relativement faible. En moyenne, ces événements durent entre 9 et 12 mois. Le plus long événement El Niño jusqu'à présent a eu lieu en 1986 et a duré 18 mois. Une chose est sûre. Jusqu'à ce qu'El Niño nous quitte, nous assisterons à des phénomènes météorologiques variés à travers le Canada.



Vous pouvez communiquer directement avec :

Hossein Bonakdari

Professeur agrégé, Faculté de génie, Génie civil

hbonakda@uottawa.ca 
Bureau / Office: 6135625800 Ext. 6016


Pour renseignements additionnels, veuillez communiquer avec: media@uOttawa.ca