Enfant, il a échappé à la guerre civile. Il consacre désormais sa vie à aider les autres

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Landry Kalembo
Après avoir grandi dans la pauvreté, vécu comme réfugié dans un nouveau pays et pris soin de son père durant ses traitements de chimiothérapie, Landry Kalembo, récemment diplômé, a entendu l’appel d’une carrière en santé des populations.
Landry Kalembo (à gauche) et son collègue de recherche Dejan Bojic (à droite) en train d'analyser des données dans un laboratoire au pavillon Roger Guindon.
Landry présentant son certificat de qualification militaire de base à son père qui n'a pas pu assister à sa remise de diplôme pour cause de maladie (août 2019).

Landry Kalembo, qui souhaite faire carrière en santé des populations et en santé publique, a pris conscience très tôt de sa vocation. « J’ai grandi en voyant beaucoup de gens qui avaient besoin d’aide, qui vivaient dans la pauvreté et qui souffraient de toutes sortes de maladies tropicales qui auraient pu être traitées », dit celui qui terminera ses études à la Faculté des sciences de la santé ce printemps.

« Je m’intéresse aux “origines développementales de la santé et des maladies” ou ODSM, un paradigme selon lequel certains facteurs environnementaux néfastes ou moments de vulnérabilité précis dans la vie d’une personne peuvent avoir des effets à long terme sur sa santé et celle de ses descendants, explique-t-il. Au lieu de traiter les gens un par un, je veux faire des recherches qui pourront aider un millier de personnes à la fois. »

La bosse des langues

Né en République démocratique du Congo, Landry avait 10 ans lorsque sa famille s’est réfugiée en Ouganda pour fuir la guerre civile. Il a passé l’année à apprendre l’anglais dans une école pour réfugiés adultes parce que sa famille n’avait pas les moyens de lui payer l’école. Son affinité pour les langues lui a rapidement valu une bourse qui lui a permis d’intégrer le système scolaire ordinaire.

« Le Congo est une ancienne colonie belge. Je parle donc le swahili, et le français est ma langue seconde, dit-il. L’Ouganda est une colonie britannique, j’ai donc aussi appris l’anglais. À 12 ans, je parlais déjà quatre langues. Je suis devenu le premier élève parrainé par le Service jésuite des réfugiés à fréquenter l’école primaire ordinaire à Kampala, la capitale de l'Ouganda. On a même écrit un article à mon sujet, dans lequel on me prédisait un avenir de scientifique ou d’homme d’affaires, ce qui a longtemps été une source d’inspiration pour moi. »

Un nouveau départ au Canada

À 16 ans, après avoir vécu six ans en Ouganda, Landry a immigré au Canada avec ses parents et ses huit frères et sœurs. Durant ses études secondaires à Ottawa, il est devenu un bénévole régulier au Parkdale Food Centre, et il siège aujourd'hui à son conseil d'administration.

« À notre arrivée au Canada, nous n’avions pas beaucoup d’argent et nous avions besoin d’un coup de pouce alimentaire, raconte-t-il. Nous fréquentions cette banque alimentaire, et je me souviens que mon père avait impressionné la directrice, Karen Secord, qui lui avait dit : “Vous devriez m’enseigner le français et amener vos enfants avec vous.” Comme j’aime parler et que l’ambiance était super, je suis bénévole depuis ce temps-là. »

Un avenir en santé des populations

Aujourd’hui, Landry détient un baccalauréat spécialisé en sciences de la santé axé sur les cours de santé des populations et de santé publique de l’Université d’Ottawa. Il fait partie de la promotion du printemps 2021.

Il entrera bientôt à la maîtrise ès sciences à l’Université d’Ottawa et prévoit faire sa thèse sur l’insécurité alimentaire, la malnutrition et la santé infantile et maternelle dans le contexte de la consommation d’opioïdes durant la grossesse à Ottawa.

« J’ai toujours été intrigué par la façon dont on conçoit les causes sous-jacentes de la maladie, et je crois qu’il faut absolument étudier les défis de santé mondiale et les facteurs qui affectent le bien-être afin de trouver des solutions viables, dit-il. Il faut passer d’un système axé sur les traitements à un système axé sur la prévention. Pour ce faire, il faut intervenir plus tôt dans la vie des gens, avant l’émergence d’effets à long terme sur la population. »

Au fil des ans, Landry a été bénévole à l’Hôpital d’Ottawa, a travaillé à des projets des Services jeunesse à Ottawa et a slamé sur la santé mentale et l’injustice raciale lors de divers événements locaux et universitaires.

En juillet 2020, Landry a établi la Fondation Kalembo, un organisme à but non lucratif qui cherche à améliorer la santé et l'éducation des jeunes, des personnes âgées et des personnes vulnérables vivant en Afrique centrale et de l'Est qui ont été touchées par des guerres civiles, des conflits, des maladies ou la pauvreté.

Il est également réserviste au sein des Forces armées canadiennes depuis 2018. Il a suivi une formation de spécialiste des systèmes de communication et d’information, et espère aussi apprendre la médecine de combat.

« J'ai beaucoup appris en obtenant mes qualifications militaires de base : le leadership, la discipline, le travail d'équipe, le courage et le travail sous pression dans des environnements extrêmes. Ces compétences m'ont aidé en tant qu'étudiant, et peut-être ont-elles influencé mon petit frère David à devenir policier. Il est maintenant agent de police au Service de police d'Ottawa, et je suis très fier de lui », dit Landry.
 

Alors que Landry était en deuxième année d’université, son père est décédé du cancer. Avant de le perdre, Landry a passé beaucoup de temps à prendre soin de lui pendant ses traitements de chimiothérapie.

« Tout le temps passé à l’hôpital, au milieu des personnes malades, m’a donné envie de faire carrière en santé, tout comme le fait d’avoir été dans une position de vulnérabilité et d’avoir vécu des insécurités liées à la pauvreté. Ce sont des choses qui m’ont profondément marqué », dit-il.

Trouver un équilibre

Lorsqu’on lui demande comment il arrivait à tout faire pendant ses études, Landry parle de l’importance d’avoir une routine adaptée à ses besoins. Typiquement, après ses cours du matin, il jouait au basketball avec ses amis, allait au centre d’entraînement et au club de salsa en après-midi, et passait ses soirées à étudier.

« Ce rythme était très sain pour moi, dit-il. J’ai trouvé un équilibre entre le plaisir, mes études et l’atteinte de mes objectifs. Ça me convenait parfaitement. C’est le conseil que je donnerais aux autres étudiants et étudiantes : établissez une routine saine qui vous convient. »