« On ne peut pas militer pour les personnes noires et rejeter les personnes queers, et vice versa. Exclure certains groupes marginalisés de nos revendications ne fait que renforcer les systèmes de discrimination et de violence qu’on cherche à démanteler », dit Shadé Edwards.
L’étudiante de deuxième année en common law à la Faculté de droit a organisé et animé la séance virtuelle Les intersections de l’identité noire, l’orientation sexuelle et l’activisme: une conversation avec Desmond Cole et Reakash Walters, à laquelle ont assisté 500 membres de la communauté universitaire le 17 septembre dernier.
« Les personnes noires qui sont aussi queers vivent à la croisée d’identités marginalisées et se heurtent à la fois à la discrimination anti-noirs et anti-queers, explique Shadé Edwards. Elles subissent donc souvent de multiples formes de violence et se retrouvent coincées dans des mouvements de résistance qui font souvent fi de leur race ou de leur sexualité. »
Organisée en collaboration avec l’Association des étudiants noirs en droit de l’Université d’Ottawa, l’Association étudiante de Common Law Student Society (AÉCLSS) et OUTLaw, groupe formé d’étudiantes et d’étudiants en droit 2SLGBTQ+ et de leurs allié.es, la conversation portait sur la discrimination intersectionnelle — l’invisibilisation des identités queers dans les espaces noirs et vice-versa avec les identités noires dans les espaces queers —, l’abolition des systèmes d’oppression, les différentes réponses communautaires aux préjudices et à la violence, et l’activisme.
L'événement mettait en vedette le militant et journaliste primé Desmond Cole, auteur du succès de librairie The Skin We’re In: A Year of Black Resistance and Power, et la diplômée Reakash Walters, auteure, militante, productrice de balados et stagiaire en droit.
Les sections suivantes résument les propos de chaque panéliste. Les citations ont été modifiées par souci de concision.
Desmond Cole: The inclusivity of radical Black, queer, feminist politics
When people engage in discussions with Desmond Cole about Black people’s struggle for liberation, he said that one of the most common questions that comes up is “How do we engage in this fight? Is it better to fight from within the system, or from the outside?”
“I think there is a big problem with this ‘inside versus outside’ question,” said Cole. “If we frame the question in this way, we assume that the systems that we are fighting against, the systems of white supremacy, patriarchy and colonialism, that they are a constant, that they have to exist. […] So, it’s not whether you want to work inside the system or outside of it, it’s whether you think the system should exist at all, or have the right to exert its dominance over all of us, and whether you think there’s another way for us to govern ourselves and relate to one another. That’s the real political struggle.”
Rather than find ways to navigate or survive systems of domination and control, Cole drew our attention to radical Black, queer, feminist ideology, which calls for dismantling these systems in favour of building relationships and systems based on love, care, respect and accountability.
Cole named Black Lives Matter Toronto as an example of a movement that follows this “radical” tradition and rejects the idea of working within the system. When he talked about BLMTO stopping the Pride parade in 2016, demanding, among other things, that police be banned from marching in their uniforms, he said, “The defining feature is BLMTO saying ‘We don’t want to work with the police or negotiate with them. […] We don’t need you if you’re not here to serve all queer people, including Black queer and trans people, Black disabled people, Black poor people…’”
Cole argued that any advocacy group that doesn’t attempt to challenge or dismantle systems of oppression either won’t bring about real change or is engaging in “the politics of tokenism,” which he says undermines and often co-opts the real struggle of those who remain on the margins.
“I begrudge approaches to activism that ask Black people to work within systems that are killing us, instead of dismantling existing systems and replacing them with systems of care,” said Cole. “We are passing off our ability as Black people to fit into, gain leadership positions in, get jobs and access to these dominator systems, passing that tokenism off as if it’s antiracism, and it’s not. Being allowed to participate in the dominant system, and in the dominant structures of power, is not antiracism just because you’re Black.”
Reakash Walters : Cultiver la sécurité collective par la justice transformatrice
En ouverture, Reakash Walters a raconté les histoires de Willimae Moore, première femme noire lesbienne au Canada à avoir été poursuivie en justice pour agression sexuelle, et de Chevranna Abdi, une femme noire trans de Hamilton, en Ontario, décédée après avoir été traînée dans les escaliers, face contre terre, sur sept étages.
« Je raconte ces histoires pour montrer comment des institutions financées par l’État collaborent pour criminaliser, isoler et “altériser” les personnes marginalisées, explique Reakash Walters. Bien que certains membres de la communauté LGBTQ2SI aient senti l’attitude violente de la police évoluer au fil du temps, ce qui est possible, les personnes noires, les Autochtones bispirituels et les personnes trans et queers au genre non conforme ne sont toujours pas à l’abri de la brutalité et de la négligence policières, ce qui est inacceptable. »
Reakash Walters indique que les communautés les plus directement touchées par la violence et la surveillance étatiques choisissent souvent de ne pas appeler la police de peur de subir encore plus de violence. Elles optent plutôt pour des solutions qui leur permettent de désamorcer les conflits et de favoriser la guérison à l’intérieur même de la communauté. C’est le principe à la base de la justice transformatrice, terme qui désigne un cadre politique et un ensemble de stratégies en pleine expansion visant à bâtir des communautés bienveillantes qui peuvent intervenir face aux conflits, à la violence, aux préjudices et aux agressions sans susciter encore plus de violence.
« Les interventions de la justice transformatrice — qui ne s’appuient pas sur l’État, sa police, ses prisons et ses systèmes de justice pénale ou de familles d’accueil — cultivent ce qui contribuent vraiment à la sécurité collective : l’accès au logement, la gratuité des transports en commun, le revenu minimum garanti, la guérison, la responsabilité et la résilience, dit la jeune femme. Les appels à abolir le financement de la police sont en fait des appels à se réapproprier le pouvoir de la communauté. Nous réclamons l’abolition du financement de la police parce que l’État ne nous a pas démontré qu’il est bien placé pour décider ce qu’est la sécurité collective. Selon moi, l’attention, l’argent et les ressources consacrés à la police et aux châtiments devraient plutôt servir à trouver des solutions communautaires à la violence et aux préjudices. »