Originaire de l’Inde, Niepukolie Nipu a emménagé au Canada en 2018 pour faire une maîtrise en biologie à l’Université de Calgary. C’est là qu’il a d’abord approfondi sa fascination pour les réactions des organismes aux facteurs environnementaux. « Je suis une personne curieuse de nature, confie-t-il. Les nouveaux concepts et les découvertes me stimulent, et c’est cette curiosité qui m’a incité à choisir les sciences. » Il a par la suite mis le cap sur l’Université Ottawa, où il effectue son doctorat. Ici, sous la direction du professeur Jan Mennigen, il continue d’étudier les processus moléculaires qui s’opèrent dans les minuscules organismes aquatiques.
Ses travaux actuels portent sur l’incidence possible de facteurs environnementaux, comme le stress chronique, les problèmes de nutrition et une faible teneur en oxygène, sur un organisme et ses descendants. À l’aide de poissons-zèbres, Niepukolie Nipu étudie comment les expériences parentales modifient les signaux moléculaires, en particulier les microARN, dans le sperme et les ovules, et l’éventuelle influence de ces changements sur la physiologie de la prochaine génération, en particulier le métabolisme et le comportement. « Nous étudions essentiellement comment les expériences des parents façonnent la biologie de leur progéniture, sans modifier les séquences d’ADN », explique-t-il.
Le doctorant touche également au domaine de la toxicologie, qui a une incidence sur les politiques publiques. Dans ce domaine, les embryons de poissons-zèbres sont de plus en plus reconnus comme une solution de rechange éthique et économique aux modèles mammifères habituels. Après avoir fait une observation accidentelle dans le cadre d’un projet parallèle, Niepukolie Nipu a mené des travaux révolutionnaires sur le bleu de méthylène, un antifongique couramment utilisé dans les recherches sur les poissons-zèbres. En collaboration avec Jith Thomas, chercheur scientifique à Santé Canada, il a découvert que le bleu de méthylène pouvait influencer la fonction et le comportement des mitochondries en modifiant les niveaux de neurotransmetteurs – un fait qui avait été négligé pendant des décennies. Ses recherches ont fait l’objet de deux publications et ont indiqué à la communauté de recherche sur les poissons-zèbres qu’il était temps de délaisser le bleu de méthylène au profit de protocoles plus reproductibles et normalisés.
Niepukolie Nipu a reçu en 2024 la Bourse Dr-Thomas-Moon, remise à une étudiante ou un étudiant de cycle supérieur du Département de biologie qui réalise des recherches sur la physiologie et la toxicologie des poissons.
Parallèlement à ses principaux travaux de recherche, le doctorant prend part à des travaux interdisciplinaires des plus intéressants. En collaboration avec la professeure Eva Hemmer et sa doctorante Hana Mirmajidi du Département de chimie et sciences biomoléculaires, il teste des nanoparticules à base de lanthanide pour leur trouver de possibles applications biomédicales. « C’est une expérience formidable qui élargit mes horizons et m’aide à mieux travailler dans d’autres disciplines », dit-il. Cette collaboration a débouché sur la co-rédaction d’une publication et a contribué à rapprocher la biologie et la chimie par l’entremise d’applications concrètes.
Un aspect particulièrement novateur de son expérience au doctorat est l’élaboration d’un système de surveillance comportementale, un projet qui est né de sa propre idée. « J’ai soulevé cette idée, et le professeur Mennigen m’a immédiatement demandé de prendre les rênes du projet et de gérer les fonds qu’il fournissait. Il m’a autorisé à utiliser les ressources comme je l’entendais, et cette grande liberté m’a donné confiance. » Ce soutien a notamment permis à Niepukolie Nipu de collaborer avec Lukasz Andrzejewski, de l’Atelier d’électronique, pour concevoir et construire le système de zéro.
« Ce climat de confiance et cette latitude renforcent grandement la confiance en soi et l’autonomie chez les personnes mentorées, précise-t-il. C’est quelque chose que je souhaite reproduire dans mes activités d’enseignement et de mentorat. »
Malgré l’intensité de ses travaux, Niepukolie Nipu trouve le temps de transmettre sa passion dans le cadre de programmes de promotion des sciences. Bénévole pour Parlons sciences, il initie les jeunes aux merveilles de la biologie. « Les enfants sont naturellement curieux. Leur parler m’oblige à penser différemment. C’est incroyablement gratifiant. » Il siège également au Comité de protection des animaux de l’Université d’Ottawa, où il examine les protocoles de recherche pour garantir le traitement éthique des animaux et veiller à ce que ceux-ci ne souffrent pas, dans la mesure du possible.
Ses activités d’enseignement et de mentorat ne passent pas non plus inaperçues. En 2025, le doctorant a reçu la Bourse commémorative Antoine-Morin pour sa détermination à partager ses connaissances et à faire preuve d’excellence en enseignement. « Ça a renforcé ma confiance en moi, explique-t-il. Les étudiantes et étudiants internationaux comme moi ont souvent de la difficulté à obtenir des subventions importantes. Cette reconnaissance me touche donc grandement. » Il a depuis encadré plusieurs étudiantes et étudiants de premier cycle, une tâche qu’il trouve à la fois exigeante et enrichissante.
Tout au long de son parcours au troisième cycle, Niepukolie Nipu a pris part à plusieurs collaborations avec différents établissements universitaires et organismes gouvernementaux, en particulier dans le cadre de son travail avec Santé Canada. « Les recherches réalisées en contexte universitaire évoluent rapidement, fait-il remarquer. Mais dans les laboratoires du gouvernement, on met l’accent sur la reproductibilité et l’incidence sur les politiques. Cette rigueur a grandement influencé ma façon d’aborder la recherche. »
Niepukolie Nipu entend poursuivre son parcours scientifique en réalisant des recherches postdoctorales. Bien que ses travaux ne soient pas liés à des applications biomédicales directes, il espère contribuer à des objectifs sociaux généraux en faisant progresser la science fondamentale et en favorisant la mise en œuvre de meilleures pratiques de recherche. « Je veux continuer de défendre ardemment la reproductibilité et la normalisation dans le domaine scientifique. C’est avant tout ma curiosité qui me motive à trouver des réponses honnêtes aux questions élémentaires que je me pose. »
Dans ses temps libres, Niepukolie Nipu aime lire et participer à des discussions sur la science, l’économie et l’histoire, en particulier lorsqu’il est en présence d’autres personnes aussi curieuses que lui. Il aime s’adonner aux petits plaisirs de la vie qui lui permettent de nourrir sa curiosité comme le fait son parcours universitaire. « Je suis impatient de continuer à me poser des questions et j’espère aider les autres à faire de même », ajoute-t-il.
Pour en savoir plus
- LE LABORATOIRE MENNIGEN - Site web du groupe de recherche du laboratoire Mennigen(En anglais)
- Le bleu de méthylène est un agent antifongique largement utilisé qui perturbe les essais de toxicité comportementale chez le poisson zèbre larvaire | Environmental Science & Technology Letters(En anglais)
- Le bleu de méthylène à des concentrations recommandées modifie le métabolisme au début du développement du poisson zèbre | Communications Biology(En anglais)
- Interactions nano-bio des nanoparticules de conversion ascendante à base de lanthanide stabilisées par la gomme arabique : étude in vitro et in vivo - Journal of Materials Chemistry B (RSC Publishing)(En anglais)