Lever du soleil à une station du Système mondial de navigation par satellite (GNSS) près de Kangerlussuaq, dans l'ouest du Groenland. Le Dr Ajourlou utilise les mouvements terrestres en 3D enregistrés par ces stations pour étudier l'histoire de la calotte glaciaire et les propriétés rhéologiques de la croûte et du manteau sous-jacents.
Crédit photo : Kristian K. Kjeldsen, Geological Survey of Denmark and Greenland.
Parviz Ajourlou a entrepris des études en sciences à partir d’une simple question qui s’est muée en mission de recherche mondiale. En Iran, où il a d’abord étudié la surface et la gravité terrestres, il était animé par le désir de comprendre non seulement les changements de la planète, mais les raisons de ces changements. Ce questionnement l’a conduit au Canada, à l’Université d’Ottawa, où il a exploré les structures profondes dans le sous-sol du Groenland. Durant son doctorat, la science, les technologies et la collaboration internationale l’ont aidé à mieux comprendre les changements climatiques et leurs répercussions.

Tout a commencé à Téhéran, où Parviz a obtenu une maîtrise en géodésie, la science qui étudie la dynamique de la forme, de la gravité et de la surface de la Terre au moyen de données de satellites. « J’ai demandé à mon directeur de recherche pourquoi la déformation de la surface avait de l’importance », se souvient-il. La réponse a tout changé pour lui : « Ce qui compte le plus, n’est pas tant ce qu’il se passe à la surface de la Terre, mais la raison de ces phénomènes. » Cette réflexion a poussé l’étudiant à s’intéresser de plus près à la physique et à la géodynamique qui sous-tendent les forces cachées de la planète.

Sa curiosité l’a finalement mené au Canada pour travailler dans le laboratoire de géophysique computationnelle du professeur Glenn Milne. Tous deux formaient une équipe parfaite : Parviz se passionnait pour les mathématiques, l’informatique et les systèmes terrestres, et le professeur Milne offrait un environnement de recherche ancré dans la collaboration internationale et les applications concrètes.

Cette nouvelle étape a amené le doctorant à changer son approche de la recherche. « En Iran, par manque de données et de technologies, nous privilégions la théorie, explique-t-il. Ici, j’ai appris à conjuguer la théorie, les applications pratiques et les divers ensembles de données. »

Il a consacré sa thèse à un casse-tête géophysique aux répercussions mondiales : la fonte de la calotte glaciaire du Groenland et la hausse du niveau des océans qui en résulte. Il a étudié la température et la structure sous la surface dans cette région à l’aide d’une méthode innovante : l’inversion conjointe. Cette méthode consiste à fusionner différents ensembles de données géophysiques (par exemple, sur l’activité sismique et la gravité) pour produire un modèle unifié en 3D de la température de la croûte terrestre jusqu’au manteau supérieur.

Parviz Ajourlou
Citation

« Ce qui compte le plus, n’est pas tant ce qu’il se passe à la surface de la Terre, mais la raison de ces phénomènes. »

Parviz Ajourlou

— Titulaire d'un doctorat

Contrairement aux études antérieures qui s’appuyaient sur un ou deux ensembles de données, l’approche de Parviz en combine plusieurs, ce qui permet d’obtenir des résultats plus exacts et de quantifier l’incertitude. « C’est comme si on regardait le même objet à travers plusieurs lentilles, » illustre le chercheur. « Chaque ensemble de données nous fournit une pièce du puzzle. En assemblant toutes les pièces, on reconstitue l’image. »

Son article à paraître dans Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) porte sur deux grands projets de sa thèse. Il expose la façon dont le modèle amélioré de température renforce la modélisation de l’ajustement isostatique glaciaire (AIG), ou la façon dont la Terre réagit à la charge des calottes glaciaires en mutation. Ces travaux revêtent une grande importance, car les modèles d’AIG sont essentiels pour comprendre comment la croûte terrestre rebondit à mesure que les calottes glaciaires fondent, ce qui influence les estimations de l’élévation du niveau des océans.

Parviz a réalisé une nouvelle percée lorsqu’il a déterminé le tracé probable du point chaud d’Islande à travers le Groenland, une question qui faisait débat dans le milieu de la géophysique depuis des décennies. Ses travaux remettent en question des hypothèses anciennes et proposent une nouvelle trajectoire d’ouest en est sur la base de données sismiques de haute résolution.

Mais le parcours du doctorant a été semé d’embûches. La COVID-19 est venue perturber les laboratoires, compromettre des collaborations et réduire le financement. Malgré tout, Parviz a persévéré, avec le soutien indéfectible du professeur Milne, qu’il décrit comme « un mentor fidèle et ouvert, qui a toujours accueilli les nouvelles idées et apporté son appui dans les moments cruciaux ».

Parviz travaille aujourd’hui à Ressources naturelles Canada, où il s’attaque à des problèmes nationaux. Ses fonctions se rapportent davantage à son expertise développée durant sa maîtrise qu’à ses travaux réalisés durant son doctorat, mais sa passion pour les sciences du climat reste entière. « Les modèles que nous avons créés pour le Groenland sont déjà utilisés par d’autres équipes de recherche, souligne-t-il. Plus que les simples résultats, l’approche elle-même présente un énorme potentiel pour la recherche sur le climat et le niveau des océans dans le monde entier. »

Son conseil aux personnes qui aspirent à une carrière en recherche est clair : faites preuve de curiosité et de patience, et ayez l’audace de tout essayer. Dans le domaine très vaste des sciences de la Terre, tout le monde peut trouver sa place, que ce soit dans un laboratoire, devant un écran d’ordinateur ou sur le terrain, sous le soleil d’été.

Parviz Ajourlou a fait plus qu’obtenir un doctorat, il a jeté des ponts entre la théorie et les applications, entre l’Iran et le Canada, et entre la science et la société. Il est la preuve que pour résoudre les grands problèmes de la planète, il faut se poser les bonnes questions et avoir le courage de chercher les réponses.

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