Menées par l’Université d’Ottawa, les recherches effectuées au moyen d’une nouvelle technologie d’imagerie satellitaire ont permis pour la première fois d’identifier dans le golfe du Saint-Laurent une baleine noire de l’Atlantique Nord, une espèce en voie de disparition.
Matus Hodul, étudiant au doctorat du département de géographie, environnement et géomatique à la Faculté des arts et coauteur avec le professeur Anders Knudby, explique comment la technologie peut servir à surveiller ces baleines gravement menacées de l’espèce Eubalaena glacialis, et à améliorer les efforts de conservation.
Donnez-nous un peu plus d’information sur l’état actuel de la population de baleines noires.
Matus Hodul :« La baleine noire de l’Atlantique Nord est gravement menacée, sa population étant estimée à quelque 336 individus. Les causes de mortalité sont les collisions avec les navires et l’empêtrement dans les cordages de pêche, d’où l’importance de pouvoir les repérer et les suivre pour favoriser leur rétablissement. Savoir où se trouvent les baleines à n’importe quel moment permet d’ouvrir ou de cesser les activités de pêche pour les éviter, et de prévenir les collisions en donnant la possibilité aux navires de les contourner. »
« Maintenant que nous pouvons les repérer et les identifier grâce à l’imagerie satellitaire, les retombées seront certainement considérables sur le plan des efforts de conservation. »
Matus Hodul
— Co-auteur et étudiant au doctorat du département de géographie, environnement et géomatique
En quoi consiste cette technologie et comment peut-elle aider les baleines noires?
M.H. : « Il s’agit d’un nouveau genre d’imagerie satellitaire offrant une résolution spatiale de 15 cm, ce qui signifie que chaque pixel qui compose l’image représente une superficie de 15 cm au sol. Pour vous donner une idée, la résolution des images est beaucoup plus fine que celles de Google Earth. Cette technologie nous permet de repérer les baleines noires de l’Atlantique Nord et de les distinguer avec certitude des autres espèces telles que le rorqual commun et la baleine à bosse. Dans certains cas, elle nous permet même d’identifier des individus en particulier, notamment lorsque la baleine porte des marques assez distinctives.
Fait intéressant, on ne sait pas où vont environ 50 % des baleines noires de l’Atlantique Nord durant les mois d’été et d’automne. Maintenant que nous pouvons les repérer et les identifier grâce à l’imagerie satellitaire, les retombées seront certainement considérables sur le plan des efforts de conservation. »
Avez-vous réussi à identifier des baleines en particulier?
M.H. : « Nous avons été en mesure d’identifier un mâle baptisé Ruffian qui s’est blessé gravement en s’empêtrant dans des cordages de pêche en 2008, une aventure qui lui a laissé une grosse cicatrice blanche sur le dos. Sur les images satellite, nous avons repéré une baleine noire portant exactement la même cicatrice, ce qui nous a permis de conclure qu’il s’agissait de Ruffian. »
Comment l’étude a-t-elle été menée et qui a dirigé la recherche?
M.H. : « Cette recherche a été menée par le professeur Anders Knudby et moi à l’Université d’Ottawa, en collaboration avec des scientifiques du Center for Coastal Studies (CCS). Le projet a été entrepris avec le soutien financier de l’Agence spatiale canadienne et du ministère des Pêches et des Océans, en collaboration avec Transports Canada. Elle fait partie de l’initiative de l’Agence baptisée baleinIdées, qui vise à explorer de meilleures méthodes de détection et de modélisation des baleines noires de l’Atlantique Nord au moyen de sources de données spatiales. »
Quand la recherche a-t-elle eu lieu?
M.H. : « La recherche s’est étendu d’avril à la fin de l’été 2022. La surveillance aérienne en vue de repérer et de photographier les baleines a été effectuée par le CCS dans la baie du Cap-Cod le même jour où les images satellite ont été prises. Le repérage des baleines sur les images satellite a eu lieu dans les mois qui ont suivi. »
L’article intitulé « Individual North Atlantic right whales identified from space » a été publié dans le numéro du 5 août 2022 de la revue Marine Mammal Science. Doi.org/10.1111/mms.12971. L’Université d’Ottawa a participé à ce projet en tant que membre d’une équipe dirigée par Fluvial Systems Research Inc.
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